Interaction écologique
Prédateurs
Étant donné leur mode de vie, les chiroptères comptent peu de prédateurs.
En Europe, ils sont occasionnellement la proie de chouette, de hibou, de faucon, de rat et de chat. Leurs pires ennemis sont les parasites. Leurs ailes, avec les nombreux vaisseaux sanguins, sont une source de nourriture idéale pour les tiques et les puces. Les serpents sont fréquents dans leurs dortoirs collectifs souterrains, sans doute comme prédateurs (à moins qu'ils hibernent dans les mêmes conditions).
En Afrique, dans beaucoup de régions, la roussette est pour l'homme un gibier et un plat de choix.
Régulation des populations d'insectes
L'université de Floride (Gainesville) était envahie par les moustiques. En septembre 1991, une bat house capable d'accueillir 200,000 chauve-souris fut construite avec toit de lattes et de bonnes conditions de température et de circulation d'air, et laissé à la colonisation naturelle après un premier essai de transfert resté infructueux.
Au printemps, 18 mâles s'installèrent, suivi par 300 autres mâles dans l'année; il s'agissait de molosses du Brésil. Au printemps 1995, arrivèrent plus de 1000 femelles qui donnèrent naissance à des centaines de petites chauves-souris. En mai 1998, à peu près 70,000 chiroptères peuplaient la bat house, consommant chaque nuit quelques 60 millions d'insectes réputés nuisibles, ce qui permit de ne plus utiliser le moindre produit chimique et donc de faire d'importantes économies.
Cette population de chauve-souris attira de nombreux hiboux et faucons, mais aussi de nombreux guetteurs humains, amateurs de chiroptères et d'oiseaux. Quelques années plus tard, l'expérience fut reconduite avec une autre bat house du côté du lac Alice.
Les chauves-souris pourraient être au moins aussi importantes que les oiseaux dans la régulation des populations d'insectes en milieu tropical. Deux équipes indépendantes ont démontré que certaines espèces d'insectes nuisibles proliféreraient si elles n'étaient pas traquées la nuit par les chauves-souris[11].
Interaction avec les plantes
Les espèces de mégachiroptères se nourrissant de nectar sont d'excellents pollinisateurs, d'autres disséminent les graines par l'intermédiaire des déjections en vol.
Certaines espèces d'arbres comme un baobab du genre Adansonia ou bien les arbres à saucisses forment même une interaction mutualiste avec les chauves-souris. Leurs grosses fleurs, à l'odeur nauséabonde pour l'homme, s'épanouissent la nuit et pendent sur le chemin des pollinisateurs.
Vecteur de maladies
Comme de nombreux petits mammifères, certaines espèces peuvent être le vecteur de virus et zoonoses.
Cela a été démontré pour le virus Ébola qui serait transmis accidentellement par certaines chauve-souris africaines.
Quelques espèces de chauve-souris des régions tropicales, de la familles des Desmodontinae et dites « vampires », peuvent dans de très rares cas sucer[14] le sang humain durant leur sommeil. Dans ces régions à risque, l'usage d'une moustiquaire suffit pour s'en protéger ainsi que des infections qu'elles pourraient transmettre.
Il est vrai que des chauves-souris malades sont susceptibles, comme d'autres animaux sauvages, de transmettre par simple léchage ou griffure des virus graves, notamment celui de la rage qui pousse parfois les animaux contaminés à mordre quand ils sont à un stade avancé de la maladie. En Europe le risque est minime : en un peu plus d'un quart de siècle, seules 8 personnes ont été ainsi contaminées entre 1977 et 2003 (3 en Ukraine, 2 en Russie, 1 en Finlande, 1 en Lettonie et 1 en Angleterre).
Il est donc possible, mais rare, qu'un humain contracte la rage de la chauve-souris (attention ce n'est pas la même rage que celle du chien) et cette maladie n'est mortelle pour l'homme que si aucun traitement n'est entrepris rapidement.
C'est pour ces raisons que, par prudence, il est déconseillé de toucher une chauve-souris, surtout si elle présente un comportement anormal, se laisse approcher ou vole difficilement. Il convient de la laisser s'échapper seule ou bien de faire intervenir un service compétent pour la soigner. Le cadavre d'un animal retrouvé mort doit être analysé par un laboratoire spécialisé qui viendra le prendre.
Déclin des populations
Dans toutes les zones densément habitées et d'agriculture intensive, la plupart des populations de chauves-souris sont en déclin. Et on constate une accentuation croissante de l'isolement des populations et des colonies.
Causes possibles
Les raisons de ce déclin sont multiples et semblent, directement ou indirectement, être liées à l'activité humaine.
L'utilisation immodérée des pesticides et autres produits phytosanitaires provoque d'une part la raréfaction et la banalisation de la faune entomologique qui est la nourriture des chauves-souris de l'hémisphère nord. D’autre part, certains de ces produits s'accumulent dans les tissus des chauves-souris, voire les tuent par ingestion directe.
Il est possible que l'exposition à de nombreux polluants et une perte de diversité génétique puissent affecter l'immunité des chauves-souris. On constate en tous cas des épidémies préoccupantes aux États-Unis avec le Syndrome du nez blanc. Des coronavirus ont aussi été signalés chez des chauves-souris européennes :
La fragmentation des zones boisées, humides et sauvages est également responsable du déclin des chiroptères, ainsi que toutes les modifications paysagères liées aux activités de l'homme (monoculture, assèchement de zones humides, pollution des sols…)
En période hivernale, la majorité des chauves-souris hivernent dans des cavités souterraines. La fréquentation accrue de ces sites (spéléologie, tourisme de masse, etc.) intensifie leur déclin.
Les chauves-souris ont besoin de conditions très spécifiques pour se reproduire. Or ces sites de reproduction ont tendance à disparaître, notamment dans l'architecture récente qui laisse peu de place aux espaces inoccupés sous les toitures. La destruction ou la restauration de bâtiments anciens, la disparition des accès aux clochers ou aux combles ou l'abattage d’arbres creux ne font qu'amplifier cette tendance.
Les chauves-souris sont adaptées à l'environnement nocturne et souffrent d'une pollution lumineuse croissante. Une étude récente a montré que l'éclairage direct des chauves-souris (ici des colonies de Rhinolophus ferrumequinum, Myotis emarginatus et Myotis oxygnathus) vivant dans des bâtiments plus ou moins illuminés et non-éclairés, mais dans des bâtiments proches les uns des autres. Les chercheurs ont étudié et comparé les dates des naissances, la masse corporelle et la longueur de l'avant-bras de ces chauves-souris et ont constaté que l'éclairage artificiel retardait le développement des jeunes de ces espèces et qu'il pouvait parfois même anéantir toute une colonie. Les petits étaient significativement plus faibles dans les bâtiments illuminés que non-éclairés. Les différences de longueur de l'avant-bras et de masse corporelle suggèrent qu'après l'accouchement le taux de croissance des jeunes est plus faible dans les chauves-souris vivant dans les bâtiments illuminés.
Une étude canadienne parue dans la revue Current Biology le 26 août 2008 montre que des chauves-souris en migration meurent d'une hémorragie interne due à la chute de pression à proximité des éoliennes.
Détermination
Elle se fait au moyen d'une clé de détermination, des enregistrements sonores, et depuis peu avec des outils informatiques qui apparaissent, dont en France, un outil d'Identification assistée par ordinateur (IAO) développé avec l'université de Jussieu.
Statut de protection
Au niveau mondial
Depuis 1979, au niveau international, la convention de Bonn et la convention de Berne demandent aux États contractants d'assurer la protection de toutes les espèces de chauves-souris décrites dans les annexes, ainsi que la protection des gîtes de reproduction et d'hibernation.
De nombreux pays mettent en place des programmes de protection des espèces mais aussi de leurs habitats (arbres sénescents, bois mort, grottes, mines ou tunnels abandonnés, greniers, gîtes souterrains dont certains rassemblent en hivernage les individus de colonies couvrant plusieurs milliers de km2...)
Europe
En 1992, en Europe, la directive "Habitat - Faune - Flore" demande aux pays de la Communauté européenne la protection stricte de toutes les espèces de chiroptères (elles figurent à l'annexe IV), ainsi que la désignation de zones spéciales de conservation pour les 12 espèces figurant à l'annexe II.
Eurobats publie des documents d'aide et conseil, de type guides de bonnes pratiques, pour la gestion forestière notamment.
France
Toutes les espèces de chauves-souris présentes en France sont intégralement protégées par l'arrêté ministériel du 23 avril 2007 relatif à la protection des mammifères selon l'article L.411-1 du Code de l'Environnement.
19 espèces sont classées dans la liste rouge de la faune menacée de France et 13 espèces sont présentes sur la liste rouge mondiale.
Aspects culturels
Quelques idées reçues sur les chauves-souris
Les chauves-souris ne sucent pas le sang des humains; seules quelques espèces sub-tropicales (vampires) qui se nourissent ordinairement de sang du bétail blessé peuvent faire, très rarement, un écart de régime.
Les chauve-souris ne mordent pas. Il est extrêmement rare en milieu tropical d'être mordu par une chauve-souris vampire et en Europe rarissime d'être attaqué et d'attraper par morsure une maladie grave comme la rage. Comme tout animal sauvage, c'est toutefois un vecteur potentiel d'infections diverses.
Les chauves-souris ne s'accrochent pas dans les cheveux.
Les chauves-souris ne sont pas aveugles.
Les chauves-souris ne construisent pas de nid. Elles utilisent les gîtes naturels ou artificiels (combles, clochers, ponts, etc.); elles ne modifient en aucun cas le gîte qui leur est offert.
Les chauves-souris ne font pas tout par la bouche. Elles possèdent les mêmes orifices que les humains, conçus pour le même usage.
Les chauves-souris ne s’attaquent pas aux boiseries; ce ne sont pas des rongeurs.
Il n'y a aucun risque de voir les chauves-souris pulluler : elles ont 1 petit/an, le plus souvent 1 tous les 2 ans.
Symbolisme
Les chauves-souris ont été longtemps persécutées en occident à cause de leurs prétendus maléfices. En les clouant aux portes des granges, on croyait lutter contre les mauvais sorts.
Les chauves-souris sont sacrées au Tonga, en Australie, en Bosnie et en Afrique de l'ouest. Elles sont souvent considérées comme la manifestation physique d'un esprit errant. Elles sont intimement associées avec le mythe des vampires à qui on prête la capacité de se métamorphoser en animaux, notamment en chauves-souris. Elles sont aussi le symbole des fantômes, de la mort et des maladies.
Pour les Amérindiens (tels les Creeks, les Cherokees et les Apaches), elles représentent un esprit malin. En Chine, elles sont le symbole de longévité et de gaieté. En Pologne et en Macédoine, elles sont considérées comme des animaux de bon augure.
Dans la culture occidentale, les chauves-souris sont souvent assimilées à la nuit avec une connotation de malheur ou de mort.
La chauve-souris est aussi l'emblème de la ville de Valence et de la marque de rhum Bacardi.
Mythologie
Le cocatrix est un animal fabuleux et imaginaire, qui possède selon la légende une tête de coq, des ailes de chauve-souris et un corps de serpent ou de coq.
Camazotz est un dieu chauve-souris dans la religion maya.
Légende
La chauve-souris et le cloître de la cathédrale de Tréguier : "Au temps jadis, une souris vint à demander l'hospitalité à une hirondelle qui avait bâti son nid dans une vieille cheminée et couvait ses œufs ; celle-ci, que son mari avait abandonnée, y consentit, mais à la condition que, durant trois jours, la souris couverait à sa place. La souris accomplit sa tâche, puis elle partit. Voilà les petits éclos, mais ils étaient couverts de poils au lieu des plumes, et ils avaient une tête et un corps de souris, avec des oreilles et des ailes crochues comme le diable. L'hirondelle en mourut de chagrin ; après ses funérailles, la reine des hirondelles fit enfermer les orphelins dans le cloître de la cathédrale de Tréguier et leur défendit, sous peine de mort, de ne jamais sortir à la lumière du soleil. Voilà pourquoi on ne voit jamais de chauve-souris pendant le jour."
Œuvres
Dans les œuvres populaires, elles ont inspiré des personnages tels que Dracula le vampire, Batman le justicier, et Ombre Aile d'Argent, le héros d'une trilogie chiroptérienne écrite par l'auteur canadien Kenneth Oppel (les trois volumes s'intitulent Silverwing, Sunwing, et Firewing).
Pour apaiser la peur que la chauve-souris provoquait chez les gens, le conteur africain Amadou Hampâté Bâ a inventé une histoire pour expliquer le fait que la chauve-souris a des ailes alors que c’est un mammifère. Dans un conte extrait des « Nouveaux contes de la savane », il explique l’origine de la chauve-souris par le croisement d’un renard et d’un oiseau.
La Chauve-Souris est une célèbre opérette viennoise de Johann Strauss fils, 1874.
Jean de La Fontaine a écrit plusieurs fables mettant en scène des chauves-souris : La Chauve-souris, le Buisson, et le Canard ou La Chauve-souris et les deux Belettes.
La Nuit des chauve-souris est un film américain réalisé par Louis Morneau, sorti en 1999.
La Chauve-souris pas si chauve est le titre donné en français à l'un des épisodes de la série télévisée d'animation Tom et Jerry Tales.
Divers
Il existe une Rue Chauve-Souris, dans la ville de Liège, en Belgique.
Pour concevoir l'Eole, une machine volante à la voilure complexe, l'ingénieur français Clément Ader a imité les ailes de la chauve-souris.
Étymologie et nomenclature
En latin classique, « chauve-souris » se dit vespertilio, mot qui n'a pas de continuateur dans les langues romanes modernes. Le terme de calvas sorices (au pluriel) est attesté, en bas latin de Gaule, dès le VIIIe siècle dans les Gloses de Reichenau pour traduire précisément vespertiliones. C'est probablement une altération, d'après calvus (« chauve »), du gallo-roman *cawa sorīx (forme reconstituée signifiant littéralement une « chouette-souris »), expression composée de *cawa, dérivé du francique, qui signifie « chouette » et de *sorīce(m), accusatif de *sorīx (en latin classique sorex, -ĭcis), « souris ». Le terme chiroptère dérive du grec kheir (ἣ χείρ): la main et ptéron (τὸ πτερόν ordinairement pluriel τὰ πτερά, le singulier désignant plutôt la plume) : l'aile.
En français les chauves-souris sont nommées par de très nombreux noms vernaculaires différents.